Prééquipement des bâtiments

SLC

 

Le pré-équipement, un concept pour le bâtiment neuf et la rénovation

 

            Le pré-équipement est un concept issu de discussions entre promoteurs et partisans de l’efficacité énergétique. Il est souvent facile de penser aux maisons passives ou aux logements basse consommation, mais la finalité n’est pas seulement d’économiser l’énergie ; il faut le faire par des solutions économiquement réalistes. Sauvons le Climat  a plusieurs fois dénoncé les concepts qui conduisaient à des dérives excessives des coûts, car les dérives de coûts interdisent aux solutions techniques d’être généralisées.

 

            La nouvelle réglementation thermique RT 2012 devrait faire théoriquement baisser suffisamment les consommations des logements neufs[1] . Mais l’expérience montre que la RT 2005 n’est pas entièrement appliquée sur le terrain et que la RT 2012 ne sera appliquée que pour les permis de construire déposés après le premier janvier 2013. Il y a donc un délai de 2 à 3 ans pendant lequel 700 000 logements seront construits sans que l’on prenne en compte le plateau de production de pétrole et la nécessaire diminution des émissions de CO2. La nouvelle réglementation conduit même, paradoxalement, à favoriser le gaz au lieu de l’électricité comme mode de chauffage dans les logements.

 

            On peut certes penser qu’une maison passive ne coûte que 5 à 15 %plus cher, mais il s’agit de 5 à 15% de surcoût sur le principal capital des français et sur un poste de dépense important ; il n’est pas étonnant que ceux qui font construire regardent les équipements performants comme une contrainte plutôt qu’un investissement. Rares sont les architectes ou les ingénieurs comme Bernard Reynier [2] qui relèvent le défi d’associer la performance thermique à un coût raisonnable.

 

            Pour les logements qui doivent être construits entre 2011 et 2014, et qui échapperont à la RT 2012, nous proposons quelques modifications à des coûts très faibles qui permettront aux logements de procéder à une diminution brutale de la consommation d’énergie, c’est ce que nous appelons le pré-équipement. Certaines des mesures envisagées seront probablement incluses dans la RT 2012, mais le pré-équipement  ne vise pas à définir une réglementation thermique figée ; il s’agit avant tout d’une attitude qui consiste à penser comment un bâtiment pourra s’adapter aux contraintes énergétiques et climatiques futures.

 

Prévoir l’utilisation de pompes à chaleur

            Les pompes à chaleur (PAC) constitueront à l’avenir, l’un des principaux moyens de se chauffer, dans les logements. Mais pour utiliser une pompe à chaleur, il faut que la pompe communique avec le milieu extérieur. Ceci nécessite l’existence d’un conduit souterrain : soit parce que la pompe est géothermique, soit parce que l’on place aujourd’hui l’échangeur air/eau assez loin de la maison. Nous suggérons donc de laisser dans chaque logement, lors de la pose de la dalle un premier tuyau coudé à travers la dalle et sous les fondations. [3]

 

Prévoir un circuit d’aération

            La VMC consiste aujourd’hui à prélever de l’air extérieur et à rejeter de l’air de la maison à l’extérieur. Ce système à deux défauts : En hiver, on prélève de l’air froid et on rejette de l’air tiède chauffé. En cas de canicule, on prélève de l’air très chaud de l’ après-midi pour aérer la maison. Or si le nombre de jours de canicule est faible, il augmentera avec le vieillissement du bâtiment.

 

            Lors de la construction d’une habitation, il est possible de préparer la maison à une ventilation plus intelligente, même si on installe seulement une VMC ordinaire. Pour cela, il faut laisser un second conduit souterrain à travers la dalle et les fondations d’au moins 20 cm de diamètre pour permettre la construction d’un puits provençal , puis il faut envisager aussi entre les étages le passage de conduites aérauliques.

 

            Dans les combles, il faut en outre, prévoir  l’évacuation de l’eau de condensation d’un échangeur de VMC double flux ou d’une pompe à chaleur sur l’air expiré.

 

            L’idéal est de pouvoir relier le puits provençal à la VMC double flux qui remplacera la VMC ordinaire dans les combles.

 

Passage au chauffage solaire : le choix de l’isolation sous plancher est irréversible

            Ceux qui se sont intéressés aux maisons solaires savent qu’elles maximisent la surface d’exposition au sud par une serre. Il est donc possible de transformer les maisons en maisons solaires par l’adjonction d’une sorte de véranda, sauf que dans ce cas il est nécessaire d’avoir pensé à isoler la terrasse au sud dès la construction. D’ailleurs l’isolation au sol des maisons devait être portée déjà à 4 m2K/W puisqu’on ne peut plus la modifier ensuite.

 

Laisser des possibilités d’isolation extérieure

            Il est probable que certains murs seront isolés par l’extérieur, une fois les logements construits. Ce sera le cas en particulier des murs situés au nord et à l’ouest.  Il est donc nécessaire de prévoir des corniches ou des débords suffisamment larges pour que l’on puisse ajouter 20 cm d’isolant. Dautre part,  lorsqu’une maison devient très isolée, pour se prémunir des canicules estivales, il devient indispensable de laisser des possibilités d’aération nocturnes par le barreaudage de fenêtres du rez-de-chaussée.

 

Envisager ou pas une production d’eau chaude solaire

            Les chauffe-eau solaires (coût 17 c€/kWh cumac) n’ont pas d’ intérêt macroéconomique par rapport aux chauffe-eau à effet Joule (7 c€/kWh) qui permettent de réguler les productions électriques [4] ; néanmoins un chauffe-eau solaire peut prolonger la vie d’une pompe à chaleur qui assurerait l’eau chaude sanitaire, en limitant son fonctionnement à la moitié de l’année. Dans ce cas, il faut prévoir une possibilité en climat méditerranéen de placer les panneaux verticaux ou "en casquette" pour éviter les surchauffes d’été et maximiser la production en hiver [5].

 

Conclusion : envisager l’avenir d’un bâtiment

            Nous voyons donc que c’est seulement en prévoyant à moyen terme les investissements que l’on pourra faire après l’amortissement d’un logement, qu’ il sera possible de sortir assez rapidement des énergies fossiles à un coût économiquement supportable. Par exemple, même si la norme de 50 kWh/m2/an en énergie primaire, qui conduit à imposer le gaz dans le chauffage, était maintenue telle qu’elle est aujourd’hui ;  il serait possible grâce aux modifications indiquées ici de brancher une PAC air-eau sur le circuit de chauffage,  lors du pic de production gazière prévu entre 2030 et 2040.

 

            La durée de vie d’un bâtiment est supérieure à 60 ans, par conséquent un bâtiment construit aujourd’hui connaîtra le pic pétrolier, le pic gazier, le pic charbon et les premières conséquences sérieuses du réchauffement climatique : si on ne peut pas construire autrement aujourd’hui, il  faut  préserver les possibilités de s’adapter à ces crises dans l’avenir.

 

[1] autour de 50 kWh/m2/an en moyenne nationale pour l’ensemble des consommations : chauffage, ECS, climatisation et éclairage

[2] ingénieur INPG, fondateur du cluster du bâtiment économe : www.batimenteconome.com On consultera son étude sur les coûts du chauffage à partir de données réalistes : http://energie.lexpansion.com/habitat/les-couts-du-chauffage-domestique-recapitulons-_a-39-892.html

[3]D’ailleurs, Il est étonnant que le légistateur oblige les constructeurs à équiper les maisons individuelles chauffée à l’électricité d’un conduit de cheminée, et ne prévoit rien pour faciliter l’utilisation de PAC en remplacement d’un chauffage à énergie fossile.

[4] cf l’article sur la saisonnalité : http://www.energie-gouv.fr/spip.php?article7

[5] On trouvera sur le site de l’institut national de l’énergie solaire : http://www.ines-solaire.com/outils.htm, les outils de calculs qui permettent d’optimiser la production d’eau chaude suivant la saison.

 

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