A propos de la décision du Conseil Constitutionnel sur la « taxe carbone »

SLC

 

A propos de la décision du Conseil Constitutionnel sur la « taxe carbone »

 

Rappelons les faits.

Le Conseil Constitutionnel a estimé que le texte de loi instituant une taxe carbone pesant sur les seuls ménages français était inconstitutionnel : « Par leur importance, les régimes d'exemption totale institués [au bénéfice des entreprises] par l'article 7 de la loi déférée sont contraires à l'objectif de lutte contre le réchauffement climatique et créent une rupture caractérisée de l'égalité devant les charges publiques ».

Le Conseil Constitutionnel précise qu'il y a rupture de l'égalité devant les charges publiques puisque le système des quotas d'émission appliqué aux entreprises ne compense en rien l'exonération de la taxe car « ces quotas sont actuellement attribués à titre gratuit et que le régime des quotas payants n'entrera en vigueur qu'en 2013 et ce, progressivement jusqu'en 2027 ».

Certains peuvent s'étonner que le Conseil Constitutionnel ait raisonné de la sorte, d'une part parce que la taxe carbone a d'abord été conçue par la Commission Rocard pour sensibiliser les particuliers qui ne sont que très indirectement concernés par le système européens des quotas dits ETS, « Emission Trading Scheme »)1 et, d'autre part, parce qu'il n'y a pas de raison de croire que la gratuité des quotas entraîne nécessairement une absence totale de contraintes. Il faut rappeler que, même gratuits, les ETS vont entrainer pour les entreprises des dépenses réelles d'investissement, organisation ou fonctionnement pour rester sous la limite d'émissions attribuées qui ira diminuant.

D'autres au contraire peuvent être surpris que certains soient surpris… car la décision du Conseil Constitutionnel est tout à fait en ligne avec celles qui ont été prises en 2000 au sujet de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) et en 2002 à propos de la taxe sur les papiers imprimés dont la presse était exemptée. Une relecture des décisions de 2000 et 2002 permettait de prévoir une telle issue et de fait, il n'y a pas eu de revirement de jurisprudence.

Il est cependant indéniable qu'en regard de la pureté juridique du projet il faut prendre en considération les risques économiques et sociaux qui en résultent et notamment celui de faire migrer les usines vers des pays n'ayant pas une politique aussi exigeante de réduction des émissions de CO2 (ou d'autres gaz à effet de serre). On ne peut en effet parler de taxation des émissions de gaz à effet de serre des entreprises sans aussi évoquer celle des produits importés.

S'il décide de soumettre les entreprises à la taxe, Sauvons le Climat demande que, dans le nouveau dispositif, le gouvernement :

module la taxe au fur et à mesure de l'instauration de la mise aux enchères des droits d'émission ETS et fasse en sorte, qu'en tout état de cause, son évolution soit prévisible.

  • ne fasse porter cette taxe que sur le CO2 émis et non sur l'énergie (voir communiqué SLC du 10 septembre 2009 « La taxe carbone ne s'appliquera pas à l'électricité »). Ce point est d'ailleurs conforme à l'argumentation du Conseil Constitutionnel qui propose de ne taxer que les centrales thermiques utilisant les combustibles fossiles.
  • s'engage à négocier avec l'Europe la mise en place d'une taxe carbone sur les produits importés. (le communiqué SLC du 20 juillet 2009 « Copenhague : au-delà des quotas ou des taxes, une Organisation mondiale de contrôle des émissions » suggère quelques pistes, notamment en son point 7)
  • affecte l'essentiel du produit de la taxe carbone prélevée sur les entreprises et à l'importation, à la promotion de l'efficacité énergétique et aux mécanismes de développement propres.
  • offre, pour les professions dont l'équilibre économique est très sensible au prix des carburants, comme les agriculteurs ou les pêcheurs, une priorité d'usage des agro-carburants détaxés en lieu et place des carburants fossiles.

La difficulté que rencontre le gouvernement à faire avaliser la taxe carbone impose que la politique de réduction des émissions de gaz à effet de serre soit soumise à une stricte évaluation de son coût. Ceci vaut également pour ce qui concerne le développement des énergies renouvelables. Dans cet esprit, « Sauvons le Climat » souhaite que soient convoqués « les états généraux de l'énergie renouvelable » promis par le Président de la République dans son discours du 9 juin dernier.

  • Assemblée Générale Ordinaire des Adhérents de Sauvons Le Climat
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