Electricité éolienne en Europe de l’Ouest : intermittence et foisonnement

SLC

Intermittence et foisonnement de l’électricité éolienne en Europe de l’Ouest

Quelles compensations espérer entre pays ?

Qu’attendre du stockage de l’électricité intermittente sous forme d’hydrogène ?

 

Une étude « Sauvons le Climat » signée Jean-Pierre Perves et Hubert Flocard

 

Des scénarios énergétiques pour les quarante prochaines années fleurissent au niveau de l’Europe ainsi que dans ses pays membres. Quand on observe le secteur de l’électricité des différences radicales apparaissent dans ces scénarios : certains supposent une croissance régulière de la consommation d’électricité et d’autres une réduction forte. L’équilibre entre énergies pilotables (centrales nucléaires et à combustibles fossiles, retenues hydrauliques) et certainesénergies renouvelables (éolien et solaire en particulier) peut être très différent.

Un certain nombre de ces scénarios préconisent un déploiement plus ou moins massif des énergies intermittentes, malgré leur handicap majeur qui est de n’offrir qu’une faible contribution à l’équilibre nécessaire entre la production et la consommation instantanées d’électricité en France ainsi qu’au niveau européen, les réseaux étant interconnectés.

Ils  supposent  que ce handicap pourrait être atténué grâce à une compensation des productions au niveau européen, un « foisonnement »[1] des productions intermittentes de zones climatiques différentes, dont ils espèrent tirer profit grâce à une interconnexion accrue des réseaux européens soutenue par la commission européenne (avec des milliers de km de ligne à haute tension). Ils supposent également l’émergence d’énormes moyens de stockage de l’électricité, alors même que les limites de l’électricité hydraulique sont bien connues, et prévoient en dernier recours des limitations règlementaires des consommations ou le recours à des tarifs dissuasifs.  

Tous ces raisonnements, parfois séduisants de prime abord, méritent un examen attentif. En effet, il s’agit de sujets complexes, qui nécessitent  une analyse détaillée des fonctionnements réels des moyens de production.

L’étude présentée par « Sauvons le Climat », qui s’appuie sur un suivi heure par heure des productions éoliennes française et européennes (7 pays d’Europe de l’ouest), évalue deux éléments essentiels: la réalité d’un foisonnement efficace des productions au niveau européen[2] et la pertinence d’un stockage massif de la production d’électricité excédentaire (lors d’épisodes de grands vents), faisant appel à une production d’hydrogène par électrolyse, souvent citée dans les scénarios.

Les résultats de cette étude, précise en ce qui concerne le foisonnement éolien (avec de plus quelques éléments sur le complément que peut apporter le solaire), et reposant sur une analyse encore sommaire en ce qui concerne la production d’hydrogène, sont cependant clairs et peu encourageants :

- Le foisonnement, tant au niveau français (en dépit de ses 3 régimes de vents) qu’européen, reste très limité, avec de fortes pénuries de quelques jours lors d’épisodes de grands froids ou de canicules, quand les besoins d’énergie sont importants. De plus on observe des cinétiques d’évolution très rapides de la production éolienne (mais également solaire), qui imposeront un usage massif de centrales à gaz, et une puissance éolienne  « garantie », sur laquelle le gestionnaire du réseau peut compter, très faible. Elle est inférieure à 5% de la puissance totale installée.

- L’efficacité de la production d’hydrogène par électrolyse est très problématique. En effet les installations d’électrolyse ne fonctionneront qu’à temps très partiel, de 1000 à 2000 heures par an, et ne permettront de stocker qu’une dizaine de % de l’énergie produite, n’en restituant qu’une partie compte tenu du rendement des processus possibles (un tiers pour une restitution sous forme d’électricité et 70% sous forme de chaleur).

Un déploiement massif de l’éolien est donc porteur d’un risque économique considérable et, dans notre pays, d’émissions accrues de gaz à effet de serre en raison d’un secours par le gaz indispensable.

A notre connaissance aucune modélisation de grande ampleur du fonctionnement d’un mix électrique mobilisant une forte puissance d’énergies intermittentes n’a été encore été engagée alors que le monde politique européen semble s’orienter, un peu à l’aveugle, vers des choix de scénarios énergétiques dont certains peuvent se révéler inefficaces et couteux, voire dangereux pour les économies de la France autant que de l’Europe.

Cette modélisation devra intégrer de façon réaliste toutes les énergies intermittentes, la résorption des goulots d’étranglement existants aux frontières et la capacité de suivi de charge de chacune des composantes du mix énergétique. Devront de plus être  identifiés les entités qui auront la charge financière de l’ensemble des investissements et coûts opératoires requis par ces nouveaux moyens de production intermittente.

« Sauvons le climat »estime qu’il est urgent qu’une telle étude soit sérieusement entreprise.

Voir le texte de Jean-Pierre Perves et Hubert Flocard sur le site de Sauvons Le Climat

 

 

[1] Le phénomène du foisonnement repose sur le cumul de l’ensemble des productions éoliennes interconnectées, en espérant qu’un vent favorable ici compensera un calme plat là-bas.

[2]  On suppose dans cette étude une capacité illimitée des interconnexions hautes tensions entre ces 7 pays, ce qui est loin d’être le cas

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