Réaction de Sauvons le Climat au projet de PPE 2018-2023

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Réaction de Sauvons le Climat au projet de Programmation Pluriannuelle de l'Énergie 2018-2023

Communiqué au format pdf

Des aspects positifs avec des perspectives sur le nécessaire accompagnement social, mais une PPE qui, si elle développe enfin des stratégies dans les domaines des transports et du bâtiment, reste inutilement focalisée sur la production d'électricité.

Sauvons le Climat a apporté une participation très active au débat public préparatoire à cette PPE en affirmant, à toute occasion, un objectif simple, clair et incontournable qui doit donner le sens à toute politique publique : la priorité absolue à la réduction des émissions de gaz à effet de serre, non seulement dans les grands engagements mais aussi dans les actes.

Il paraît logique, à cet effet, que la PPE stimule nos atouts (biomasse, nucléaire, systèmes intelligents, mobilité électrique) tout en privilégiant, dans nos secteurs les plus émetteurs, les actions les plus efficaces et créatrices d’emplois en France : décarbonation des énergies thermiques et électrification (transports et bâtiments), rénovation des bâtiments énergivores...

La récente actualisation des études du GIEC ne fait que renforcer cette priorité absolue. Alors que notre pays souhaite s'affirmer comme un champion de la lutte contre le changement climatique, cette orientation doit constituer la clé de lecture prioritaire du projet soumis à débat. Nous constatons, au niveau des annonces, des points positifs, mais également les mêmes incohérences que celles constatées dans les précédentes PPE. Le projet présente quasiment les mêmes objectifs chiffrés que la précédente version pour 2023, sans évaluation économique globale et sans correctifs apportés compte tenu d’un bilan 2013/2017 très décevant. On ne peut que rappeler la remarque de la Cour des Comptes dans son rapport d’avril 2018 : « Les acteurs du monde de l’énergie – même au sein des administrations intéressées - sont nombreux à ne pas avoir cru dans les objectifs et la trajectoire définis par la LTECV et la PPE. Ce faisant, cet outil a failli à l’objectif qu’il s’était donné, celui d’offrir un cadre prévisible et consolidé de l’évolution de la politique énergétique jusqu’en 2023. » La révision proposée de la PPE nous semble souffrir de la même fragilité.

Dans ce contexte :

  • Sauvons le Climat se félicite de la priorité affichée à la lutte contre le changement climatique. L'évolution du climat crée en effet une situation d'urgence et l'objectif crucial de baisse rapide et irréversible de toutes les émissions de gaz à effet de serre doit être le vecteur prioritaire de tous les choix qui sont réalisés.
  • Sauvons le Climat approuve que l’accent soit mis sur le chauffage des bâtiments et des habitations et sur l'orientation vers le remplacement des modes de chauffage les moins performants et les plus coûteux. L'objectif de remplacement des chaudières fioul chez les particuliers est un point très positif. Il doit permettre d'aller vers des modes de chauffage modernes décarbonés en excluant toutes les énergies fossiles, y compris le gaz naturel.
  • Sauvons le Climat se félicite de la place faite au transport, mais considère qu'une politique de transformation des modes de transport devra absolument intégrer les délais d’adaptation tant personnels (coûts des véhicules, choix de l’habitat) que collectifs (transports collectifs, répartition de l’habitat) et industriels (cas du passage brutal du diesel à l’essence, décarbonation du transport routier de marchandises).
  • Sauvons le Climat s'interroge sur le manque de cohérence entre la priorité climat et la focalisation maintenue sur le mix de production d'électricité alors même que ce secteur est très faiblement émetteur et place, justement, la France dans une situation privilégiée. Sauvons le climat regrette fortement que l’exercice de préparation de cette PPE n’ait pas servi à corriger cette focalisation pourtant dénoncée par de nombreux contributeurs.
  • Sauvons le Climat se félicite de la perspective de la fin de toute production d'électricité à partir de charbon dans notre pays. Sauvons le Climat ne doute pas de l'engagement de l'état et des entreprises concernées dans l'accompagnement des territoires impactés par la fermeture des centrales charbon, et dans la reconversion des salariés. Sauvons le Climat regrette que la fermeture en 2020 des 2 réacteurs de Fessenheim, outils de production sûrs et décarbonés, risque de faire différer, au nom de la continuité de fourniture, la fermeture des centrales charbon alors que c'est l'arrêt de ces centrales qui permettra une baisse des émissions de CO2. Il est plus que paradoxal, dans un contexte d'urgence climatique, d'arrêter des moyens de production qui sont bien moins émetteurs que la moyenne du mix européen et même français avant de le faire pour des centrales très émettrices.
  • Sauvons le Climat s'étonne de la confirmation d'un objectif daté de baisse de la part du nucléaire dans la production d'électricité à 50%. Certes, l'objectif totalement irréaliste de 2025 est définitivement abandonné, mais nous considérons que la mise à l'arrêt de réacteurs amortis devrait se faire sur des bases liées à la sûreté et à l'économie et à une stratégie industrielle. Sauvons le Climat rappelle en effet que l’arrêt de réacteurs nucléaires sûrs avant leur fin de vie économique et/ou technique ne sert à rien (et peut même être néfaste) pour le climat et coûte fort cher à la collectivité. Une baisse significative de la part du nucléaire ne pourra se faire sans impact sur le climat que si la baisse peut être compensée par des moyens de production capables de fournir en continu une électricité décarbonée. Seul l'hydraulique réunit à ce jour ces conditions, les productions éolienne et solaire devant être adossées à des moyens de stockage qui ne sont pas disponibles à cette échelle pour le moment. Sauvons le Climat s'interroge de ce fait sur l'affichage d'un objectif 2035 avec un nombre annoncé de réacteurs à fermer tout en notant la référence du Président de la République à un nécessaire développement préalable de moyens compétitifs de stockage de l'électricité.
  • Sauvons le climat s'interroge sur les objectifs affichés concernant le gaz renouvelable : les objectifs sont loin de faire du gaz une énergie décarbonée (10% de la consommation de gaz à l'horizon 2023) et la compétitivité de cette solution est clairement interrogée dans la PPE. Cette solution technique manque ainsi totalement de maturité et de compétitivité (à l'exception peut-être de la méthanisation agricole) et ne peut apporter de réponse à l'urgence de la situation climatique. Les solutions gazières restent donc des solutions fossiles et émettrices de CO2 et devraient donc être exclues à ce stade de la stratégie nationale. Les 7 à 9 milliards de soutien prévus sur la période peuvent utilement être ré affectés aux dispositifs d'accompagnement des transitions.
  • Sauvons le Climat s'interroge sur l'absence de volonté de développement des usages de l'énergie solaire thermique alors que cette source d'énergie est porteuse de sens et d'efficacité énergétique dans certains territoires de l'hexagone et Outre-Mer.
  • Sauvons le Climat s'inquiète du maintien d'une politique de soutien aux énergies renouvelables électriques qui sont coûteuses et d'un apport plus que limité à la lutte contre le changement climatique. Même si la PPE prévoit une plus grande compétitivité de ces modes de production, Sauvons le Climat considère que le développement des énergies renouvelables électriques doit se faire désormais sans subvention, et en intégrant la totalité des coûts (y compris le back-up nécessaire lorsque le renouvelable ne produit pas, ainsi que les coûts d'adaptation des réseaux). Au niveau actuel de maturité économique des renouvelables électriques, les niveaux de compléments de rémunération atteints lors des derniers appels d'offre maintiennent un prix de la tonne de CO2 évitée à un niveau insupportable et injustifié.
  • Sauvons le Climat s'inquiète fortement, par ailleurs, des risques de dégradation à court terme de la sécurité d'approvisionnement en électricité du pays, aggravés par la nécessaire fermeture des centrales au charbon. Les moyens de production intermittents, dépendants du vent et du soleil, sont en effet incapables de garantir cette sécurité, critique lors des pointes de consommation hivernales, durant lesquelles la production nucléaire reste et restera longtemps indispensable.

Par les choix qui y sont faits, la PPE va engager notre pays bien au-delà des dix années à venir. Ce programme se doit donc d'intégrer toutes les dimensions des options stratégiques qu'il privilégie. Dans ce sens, la Recherche et Développement devrait s'attacher à préserver les atouts de la France dans les domaines essentiels que sont le nucléaire, l'automobile et la maîtrise de la demande en énergie.

Sauvons le Climat s'associe aux enjeux prioritaires qui ont été débattus, à l'initiative du Président de la République, durant ces dernières semaines : la baisse des émissions de gaz à effet de serre liées à la consommation d'énergie, la réduction de la fracture énergétique dans la population, le développement d'une filière industrielle française des technologies bas carbone, et les enjeux de souveraineté (dépendance aux métaux rares, au pétrole, etc…). 

Sauvons le Climat considère cependant que l'absence de recherche d'une optimisation globale de la dimension économique du programme est très préoccupante. Cette faiblesse chronique figurait déjà dans les scenarios prospectifs affichés par RTE et qui ont servi de base au débat et à ce projet de PPE. Il est indispensable, au risque de tomber dans la manipulation, de pratiquer la vérité des coûts et préciser les impacts financiers associés aux choix qui sont faits. Le coût pour la nation et les familles de chacune des actions proposées devrait être présenté (et en particulier le coût de la tonne de CO2 évitée) afin d’établir les priorités. Sauvons le Climat rappelle qu'à ce jour, selon la Cour des Comptes, plus de 121 milliards d'euros ont été engagés dans le soutien aux énergies renouvelables électriques alors que les émissions de notre pays sont en augmentation depuis 2015.

Sauvons le climat rappelle enfin que des marges de manœuvre importantes pourraient être dégagées pour soutenir des aides à la transition et des mesures sociales en diminuant les aides aux énergies renouvelables électriques (qui sont totalement disproportionnées au regard de leur apport concret).

Sauvons le Climat poursuivra sa totale implication dans la préparation des trajectoires énergétiques et environnementales du pays en participant à la totalité des concertations et des débats qui seront organisés à toutes les échelles territoriales.

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