Sortir de l’illusion : Non, les renouvelables ne peuvent pas remplacer le nucléaire

SLC


Que l’éolien, la plus mature des énergies renouvelables, soit une alternative à considérer, c’est une certitude que personne de sensé ne songe à contester !
« Sauvons le Climat » a déjà expliqué pourquoi cette perspective ne présente d’intérêt pour limiter les émissions de gaz carbonique que dans des régions dotées de centrales au charbon, fuel ou gaz (cas des Danemark, Allemagne et Espagne, pays européens leaders de l’éolien ; ou en Corse, ou dans nos DOM-TOM) mais qu’elle n’aurait aucun avantage écologique chez nous puisque la production d’électricité de l’hexagone ne produit pratiquement pas de gaz à effet de serre.

Allons plus loin : une sortie du nucléaire est-elle possible sans recourir à des centrales thermiques?

Au soir du 17 mars, « Sortir du nucléaire » a sorti un communiqué triomphant, tonitrué sur les ondes et complaisamment relayé sans contradiction par les médias, dont est extrait l’avant-dernier paragraphe suivant : « Le premier réacteur EPR coûterait au minimum 3,3 milliards d’euros, payés directement par les consommateurs d’EDF. L’étude du cabinet d’étude d’experts indépendants “Les sept vents du Cotentin” montre que cette même somme permettrait de produire autant d’électricité à partir d’énergies renouvelables et de créer 15 fois plus d’emplois. » Chiche !

Sachant que l’investissement requis pour la conception, la construction et la mise en service de 1 kW éolien [1] tourne autour de 1300 €, il serait effectivement possible, avec « cette même somme », de construire un ensemble éolien de 2540 MW installés.
Observons ce qui se passerait concrètement dans un tel cas :

1) en France, le vent souffle convenablement environ 2 300 heures par an , donc la solution alternative des « Sept vents du Cotentin » pourrait produire, en moyenne annuelle, 2300 x 2540 = 5,8 TWh, c’est-à-dire moins de la moitié que l’EPR (12,9 TWh[2]). La durée de vie d’une éolienne est estimée à 15 années, celle de l’EPR sera de 60 ans. L’alternative éolienne produirait donc 15 x 5,8 = 87,6 TWh au lieu de 60 x 12,9 = 774 TWh, soit presque 9 fois moins d’énergie sur sa durée de vie,
2) pour produire chaque année autant que l’EPR, il faudrait en fait installer plus de 5600 MW. soit 1120 éoliennes du type le plus puissant (la « 5M » de l’Allemand Repower), dotées de mâts de 120 mètres et dont les pales culminent à 183 mètres de hauteur, sur 560 km² environ[3],
3) et aussi presque tripler les lignes électriques (encore plus de pylônes) pour passer, les jours de vent favorable, une puissance presque triple de celle, quasi-constante, délivrée par le réacteur honni !
4) le prix de revient de l’EPR est estimé par le Ministère de l’Industrie à 0,045 €/kWh mais EDF[4] est obligée d’acheter l’énergie éolienne, énergie renouvelable la plus économique à ce jour, si l'on excepte l'hydraulique, à 0,0835 €/kWh. Les « consommateurs d’EDF » paieront donc presque double, sûrement ravis de la sollicitude de « Sortir du nucléaire » à leur égard ?
5) si cette paradisiaque « ferme » éolienne était bâtie, elle procurerait de l’emploi, certes : au mieux à 600 personnes[5], c’est-à-dire pas plus d’emplois permanents que le réacteur abhorré.
Est-il besoin de préciser que, du fait de notre maîtrise industrielle, les emplois requis par la construction de l’EPR en usines et sur le site de Flamanville, seraient, eux, évidemment situés en France pour la plupart ?
6) il est important de savoir que lorsque le vent est nul, insuffisant ou trop fort, il faut disposer d'une énergie de substitution à celle, défaillante, des éoliennes, qui, à défaut de nucléaire, ne peut provenir que de la combustion des fossiles (gaz, pétrole, charbon, lignite),
7) le « foisonnement » éolien ayant ses limites, l’exploitation d’un fort contingent de centrales hautement productrices de CO2 deviendrait indispensable pour assurer l’équilibre du réseau et la survie du pays, ce qui mettrait en grand danger la nature ainsi que les générations futures,
8) enfin, n’oublions pas que, au prix auquel seront bientôt vendus les combustibles fossiles s’ajoutant à celui de la production éolienne, l’utilisation de l’électricité deviendrait un signe extérieur de richesse réservé aux classes aisées.

Nous concluerons en notant qu’il serait temps pour Stéphane Lhomme et ses « 765 associations » de sortir de l’illusion.

Référence : notre communiqué du 24 avril 2006 : A Cherbourg les antinucléaires ont trahi l’écologie et le climat


Notes
[1] Sur terre, ce qui est le cas des éoliennes opérationnelles en France. Comme l’éolien industriel est indéniablement mature, cette technologie cumulant plus de 75000 MW dans le monde, il y a peu d’espoir que les coûts baissent significativement (actuellement ils ne cessent de monter, les subventions nourrissant l’inflation). Par ailleurs, les experts s’accordent sur un montant double en offshore mais on manque totalement de recul sur cette filière.
Rq. : toutes les données utilisées sont issues de l’ADEME, et corroborées par la Commission de Régulation de l’Energie, instance indépendante installée par la loi du 10 février 2000 (qui institua aussi l’obligation d’achat des énergies renouvelables).
[2] L’EPR a une puissance de 1600 MW et est disponible à 92%. Pouvant donc fonctionner 8059 heures/an, il produira, en moyenne, 12,9 TWh (milliards de kWh).
[3] Trois fois la hauteur de Notre-Dame de Paris, sur une surface équivalent au dixième du département de la Manche !!!
[4] Loi sus-dite, complétée par les arrêtés tarifaires « Cochet » (juin 2001) et « Olin-Loos » (juillet 2006). A noter toutefois que l’éolien est la moins chère des énergies renouvelables pour produire de l’électricité. Le tarif d’achat de l’offshore a été fixé à 0,132 €/kWh, pendant 20 ans.
[5] Total annonçait, le 8/12/2005 (selon l’AFP, reprise par Enerpresse), que son « plus grand projet éolien à terre en France […] devrait générer une vingtaine [d’emplois] pendant la phase d’opération » (30 éoliennes de 3 MW, en Aveyron).


Le collectif «Sauvons le climat» fondé en mai 2004, association loi 1901 depuis Décembre 2005, a pour ambition d’informer nos concitoyens, de manière indépendante de tout groupe de pression ou parti politique, sur les problèmes relatifs au réchauffement climatique et sur les solutions proposées pour le ralentir. Il est doté d’un comité scientifique, présidé par Michel Petit, ancien responsable du groupe français d’experts au GIEC. Son manifeste a été signé par plusieurs milliers de personnes.

La signature du manifeste et les adhésions sont possibles sur le site www.sauvonsleclimat.org

  • Assemblée Générale Ordinaire des Adhérents de Sauvons Le Climat
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