Quand la communication prend le pas sur la technique, ou quand les poncifs des renouvelables intermittents servent de paravent de vertu et d’argument publicitaire.

EDF est le fournisseur officiel de l’électricité des Jeux Olympiques de Paris 2024. Logique pensons-nous.

« C'est pour nous une façon de faire savoir que l'électricité d'EDF est très décarbonée » dit-on à EDF. On ne peut que souscrire.

« C'est l'occasion de montrer qu'EDF est un acteur majeur dans la production d'énergies renouvelables[1] » poursuit-on : pourquoi pas, pensons-nous. EDF affiche vouloir « proposer des solutions innovantes, pouvant décarboner le secteur de l'événementiel, qu'il serait ensuite possible de réutiliser ». Bon.

Donc, des ombrières solaires équipées de panneaux flexibles sur le village olympique (pour fournir 20 % de l’énergie consommée) ou sur le centre aquatique, pourquoi pas ; une installation solaire flottante sur la Seine pendant les Jeux, à titre de démonstration, admettons.

Mais notre appréciation commence à vaciller quand les organisateurs se targuent de Jeux alimentés à 100 %, c’est-à-dire à tout moment, par de l'électricité renouvelable. Dans le film publicitaire d'EDF pour les JO, l'accent est mis sur « l'énergie qui se renouvelle ». EDF est ainsi présenté comme « le fournisseur officiel d'électricité renouvelable de Paris 2024 » : là, on est un peu perdus mais on se dit que l’hydraulique va être mise en avant.

Patatras, on nous explique que pour cela, EDF mise tout d’abord sur huit fermes éoliennes et solaires[2], réparties sur tout le territoire. Une façon d’assurer qu’au moins un site soit en capacité de produire de l’électricité « quelles que soient les conditions météo[3] » : première couleuvre à avaler.

EDF annonce avoir mis en place une série de dispositifs pour garantir que l’électricité consommée viendra bien de ces sites de production et notamment des certificats d’origine spécifique : deuxième couleuvre quand on connaît le système des garanties d’origine, qui ne garantit en fait rien du tout.

On nous annonce aussi un système de traçabilité unique Trackelec qui permettra une certification heure par heure. D’une part un suivi au pas horaire est insuffisant puisque l’équilibre production-consommation doit être assuré en permanence et d’autre part, pourquoi une telle usine à gaz (!) alors que nous disposons à toute heure d’une électricité décarbonée. C’est une bien mauvaise pédagogie. On reconnaît d’ailleurs les limites de l’exercice puisqu’on nous dit :  « EDF estime ainsi qu’il sera en mesure de couvrir 80 % de la consommation des Jeux avec la concomitance horaire »[4]. 80 % c’est bien, mais ça ne donne pas une fourniture renouvelable garantie, c’est-à-dire à 100 %.

Ainsi, le pays qui propose à chaque instant, grâce à son parc nucléaire et à son hydroélectricité, l’électricité la plus décarbonée d’Europe se retranche derrière les poncifs des renouvelables intermittents pour en faire un paravent de vertu et un argument publicitaire.

Il parait qu’au moment de l’attribution des Jeux, la dimension renouvelable était incontournable et une condition sine qua non pour être choisi. Admettons, même si on a été beaucoup moins regardant sur les impacts environnementaux des Jeux de Sotchi ou de Pékin par exemple. Mais pourquoi, dans ce cas, ne pas être revenus, par la suite, à une dimension décarbonée plus raisonnable et plus conforme aux enjeux pour le climat. Ou, a minima, ne pas avoir mis en avant la fourniture par l’hydraulique, décarbonée, fiable et pilotable.

Si les Jeux peuvent et doivent être une vitrine des savoir-faire français, pourquoi ne pas mettre en avant cet acquis assez unique et fondamental à l’heure de la lutte contre le réchauffement climatique : la capacité de la France à fournir à chacun, partout et en toutes circonstances une électricité décarbonée, modèle de ce qui sera indispensable dans un futur proche ?

Comment la France et EDF ont-elles pu se prêter à ce jeu de dupes et rater une telle occasion d’affirmer notre excellence en matière de fourniture d’électricité décarbonée, fiable et pilotable ? Pour répondre au slogan de la publicité EDF, c’était la bonne façon de « faire briller les Jeux ». C’est bien à la fois une occasion manquée et une supercherie réussie.

 

[1] La Tribune   5 mars 2024

[2] 6 parcs éoliens (Bois-des-Barthes (Haute-Loire), Chemin-d’Ablis (Eure-et-Loir), Côte-de-Jade (Vendée), Fécamp (Seine-Maritime), Salles-Curan (Aveyron), Veulettes (Seine-Maritime)) et 2 parcs solaires (Lazer (Hautes-Alpes), Ottmarsheim (Haut-Rhin))

[3] Sport Stratégies   18 mars 2024

[4] Capital   6 mars 2024

 

  

 

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