Sauvons le Climat
30 mars 2012
Intermittence et foisonnement de l’électricité éolienne en Europe de l’Ouest
Quelles compensations espérer entre pays ?
Qu’attendre du stockage de l’électricité intermittente sous forme d’hydrogène ?
Hubert Flocard et Jean-Pierre Pervès
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SOMMAIRE
Des scénarios énergétiques pour les quarante prochaines années fleurissent au niveau de l’Europe ainsi que dans ses pays membres. Ils sont fortement encouragés par la Communauté Européenne qui a, pour sa part, élaboré la « ENERGY ROADMAP 2050 ». Quand on observe le secteur de l’électricité des différences radicales apparaissent dans ces scénarios :
- certains supposent une croissance régulière de la consommation d’électricité et d’autres une réduction forte,
- certains ont recours à des énergies pilotables (nucléaire et charbon avec séquestration) et d’autres à un développement radical des énergies renouvelables (éolien et solaire en particulier), comme certains scénarios de la Communauté Européenne et ceux de l’Allemagne.
La plupart de ces scénarios supposent un déploiement plus ou moins massif des énergies intermittentes, malgré leur handicap majeur qui est de n’offrir qu’une faible contribution à l’équilibre nécessaire entre la production et la consommation instantanées d’électricité, tant au niveau national qu’européen, les réseaux étant interconnectés.
Pour remédier à cette faiblesse les scénarios envisagent plusieurs types de moyens d’action :
- limitations temporaires de consommation (effacements des consommations ou tarifs dissuasifs),
- utilisation en compensation d’énergies stockables soit fossiles comme le gaz, soit « renouvelables » (hydrogène, méthane de synthèse, barrages hydroélectriques),
- et développement d’une solidarité européenne basée sur un « foisonnement » des productions intermittentes des différentes zones climatiques (le vent des Mers du Nord et Baltique et le soleil du bassin méditerranéen).
Tous ces raisonnements, séduisants de prime abord, méritent un examen attentif. En effet, les scénarios présentés, bâtis à partir de modèles sommaires, ne semblent guère s’appuyer sur des études techniques réalistes. Il s’agit de sujets complexes car touchant à l’organisation de la société. Ils nécessitent donc une analyse détaillée du fonctionnement des moyens de productions et de l’optimisation de leurs usages.
L’étude présentée, qui s’appuie sur la réalité de la production éolienne en France et en Europe de l’ouest (7 pays), a pour objectif de quantifier deux éléments essentiels dans la stratégie d’usage de cette énergie, dont la production varie considérablement : la réalité d’un foisonnement efficace et la pertinence d’un stockage massif de la production excédentaire (lors d’épisodes de grands vents) sous forme d’une énergie renouvelable stockable (le choix a été fait de l’hydrogène produit par électrolyse), capable de restituer son énergie sous forme d’électricité par vents faibles.
Nous avons travaillé sur les mesures réelles des productions éoliennes de chacun des pays, suivies au pas horaire, lors de l’hiver 2010/2011 (de septembre à mars). Dans un deuxième temps, pour une prise en compte des productions de chaque pays à long terme, nous avons amplifié ces productions pour les mettre au niveau de puissance des scénarios annoncés qui anticipent un déploiement massif de l’éolien en 2030.
Les résultats de cette étude, précis en ce qui concerne le foisonnement, mais reposant sur une analyse très simplifiée en ce qui concerne la production d’hydrogène par électrolyse, sont clairs et peu encourageants :
- Le foisonnement, tant au niveau français (en dépit de ses 3 régimes de vents) qu’européen, reste très limité.Les puissances minimales et maximales correspondent respectivement à 4% et 60% de la puissance totale installée Pn, avec de fortes pénuries lors d’épisodes de grands froids ou de canicules, quand les besoins d’énergie sont importants. De plus on continue à observer d’une part des cinétiques d’évolution très rapides qui imposeront un usage massif de centrales à gaz et d’autre part une puissance « garantie » très faible, inférieure à 5% de la puissance installée.
- L’efficacité de la production d’hydrogène par électrolyse est très problématique. En effet les installations d’électrolyse ne fonctionneront qu’à temps partiel, de 1000 à 2000 heures par an, et ne permettront de stocker qu’une dizaine de % de l’énergie produite, en restituant seulement moins de la moitié compte tenu du faible rendement du processus si on veut récupérer l’énergie stockée sous forme d’électricité.
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La variabilité de la production des éoliennes est un phénomène connu, mesuré, qui repose sur une science bien maîtrisée. Si l’intermittence, qui correspond à l’impact des conditions climatiques (il y a du vent ou il n’y en a pas !), est bien connue, l’aspect rendement de l’éolienne elle-même l’est moins. Il ressort de l’équation ci-dessous :
Cette équation (loi de Betz) montre que le rendement théorique maximal d’une éolienne est de 59% (atteint quand la vitesse du vent à l’aval, V2, est égale au tiers de la vitesse V1 en amont) et que les vitesses du vent (amont et aval) sont prépondérantes dans cette équation car elles interviennent à la puissance 3.
Sachant que les éoliennes modernes ont déjà un rendement très élevé, proche du rendement théorique, on peut conclure qu’elles sont matures et que les seuls gains de productivité possibles résulteront du choix de zones très venteuses, d’où par exemple le choix de sommets de collines, d’implantations marines et d’éoliennes de plus en plus hautes.
Pour les stratégies d’implantation, on peut tenir compte de ce que les réseaux électriques sont largement interconnectés au niveau européen. Jusqu’à un certain point ceci permet de jouer sur les solidarités de façon à satisfaire les besoins de consommation en allant chercher les énergies renouvelables là ou elles sont les plus efficaces ou bien disponibles à un moment donné. On peut ainsi envisager des transferts sud/nord pour le solaire et pour l’électricité éolienne depuis des zones ventées vers des zones de calme. Dans ce dernier cas, on dira que l’on bénéficie de ce qu’on appelle le foisonnement des productions.
1. Quel est l’importance du foisonnement
L’éolien par nature très intermittent est assez bien prévisible à court terme (quelques jours à quelques heures), bien que la figure 1 montre que d’importantes erreurs sont toujours possibles. De toute façon, la production éolienne restera peu prévisible sur des bases mensuelles et saisonnières.
Fig.1 : Production éolienne allemande pour la période du 18 au 21 janvier 2012 (courbe noire) et erreur de prévision à 24h sur cette production (courbe rouge). Pour les deux courbes, l’échelle des ordonnées est en MW. L’échelle des abscisses est graduée en heures. La puissance installée du parc éolien allemand s’élevait au premier janvier 2012 à 29 GW. Les données sont extraites du site transparency.eex. L’erreur de prévision est définie comme la production effective moins la prévision de production. Ainsi le 19 en fin d’après-midi, par suite d’une arrivée brusque de vent, l’éolien allemand atteignait une productivité de 65%, la prévision avait alors sous-estimé cette production de 7,5GW. Quelques heures plus tard, on notait l’effet inverse, la prévision avait surestimée la production de 4GW. C’est donc l’équivalent de 11,5 GW de centrales dispatchables qu’il a fallu mobiliser dans un sens (arrêt) puis dans l’autre (démarrage) en moins de 4h. Sur l’ensemble des mois de Janvier et Février on compte six épisodes pour lesquels l’amplitude de variation de l’erreur de prévision à 24h a été supérieure à 6GW en moins de six heures.
Or l’obligation de réguler précisément la production d’électricité pour l’accorder à une consommation instantanée variable selon les cycles journalier, hebdomadaire, et saisonnier, est impérative. Elle réclame une planification des productions des réseaux européens interconnectés et la mise en place de centrales de secours, fonctionnant à temps très partiel.
1.1. La situation française durant l’hiver 2010/2011
La production éolienne en France pendant l’hiver 2010/2011, soit du 1er septembre 2010 au 31 mars 2011, suivie par tranches de 15 minutes par RTE, est montrée à la figure 2. Cette période automne/hiver est intéressante car elle est généralement la plus ventée en moyenne et la consommation électrique y est la plus importante. De plus, comme nous disposons des productions éoliennes de 6 autres pays européens pendant la même période, nous sommes en mesure de faire des comparaisons en tenant compte des divers régimes climatiques. La production d’électricité éolienne en France sur cette période à été de 6.570 GWh pour une puissance installée moyenne de 5650 MW (environ 3500 éoliennes), soit une productivité moyenne de 22,8% sur 7 mois[1]. La production totale d’électricité du pays étant dans la même période de 320.500 GWh, la contribution de l’éolien a été de 2,04%. On observe que la production est très intermittente, avec des cinétiques d’évolution rapides, même si la France bénéficie de trois régimes de vents.
Fig. 2 - Production éolienne en France de septembre 2010 à mars 2011 (la courbe donne l’évolution heure par heure, ces valeurs étant extraites du site Eco2mix de RTE qui fournit ces données par ¼ heure)
Les extrêmes suivants sont observés:
- Puissance minimale : 180 MW soit 3,3 % de la puissance installée Pn ; des puissances inférieures à 10 % de Pn sont observées 7 fois.
- Puissance garantie, (celle sur laquelle le gestionnaire du réseau peut compter en permanence), inférieure à 5% de Pn.
- Puissance maximale : 3875 MW, soit 71 % de Pn, avec 7 épisodes dépassant 60% de Pn ou 112 MW.
- Cinétique d’évolution : la plus importante a été de 380 MW/h, soit de 7% de la Pn en une heure. On note aussi des variations de 2900 MW soit 50% de Pn en 24 h.
Une analyse plus détaillée apporte des informations essentielles pour les gestionnaires du réseau. Ainsi la période de novembre 2010, qui a vu une seconde quinzaine caractérisée par de grands froids, confirme une tendance lourde de l’éolien, à savoir le manque de vent lors de grand épisodes anticycloniques (c’est le cas environ 4 fois sur 5). La figure 3 montre que la puissance éolienne moyenne n’a été que de 16% pendant les 15 jours du 15 au 30 novembre avec des périodes de 2 à 3 jours avec des puissances inférieures à 10% de Pn. Pendant cette période la puissance appelée sur le réseau était très importante, s’élevant jusqu’à 90.000 MW.
Fig. 3 - Evolution de la puissance éolienne en France en novembre 2010 (courbe et échelle de gauche) et de la température moyenne (échelle de droite, en traits rouges journées chaudes et en traits bleu les journée froides)
La production éolienne est mise (figure 4) en regard de la consommation totale d’électricité pendant cette même période en France. On constate que la contribution éolienne a été négligeable pendant la période froide.
Fig. 4 - Puissance totale (en MW) appelée en France en novembre 2010 et puissance fournie par l’éolien
Pour nous projeter en 2030, nous faisons l’hypothèse d’une consommation d’électricité maintenue au même niveau en 2030 (hypothèse correspondant simultanément à une meilleure efficacité énergétique et à une poursuite du développement des usages de l’électricité, par exemple dans les transports). Si, comme le prévoient certains scénarios avec énergies renouvelables prépondérantes, la puissance éolienne installée était portée à 55.000 MW, avec une baisse notable de l’électricité nucléaire (baisse de moitié ou plus), il serait nécessaire d’être en mesure de gérer simultanément des variations de consommation horaires, quotidiennes, hebdomadaires et saisonnières et des variations fortes de la puissance éolienne. La figure 5 ci-dessous met en regard ce que seraient ces variations en 2030 en supposant les mêmes conditions climatiques que dans la période 2010/2011 et une puissance éolienne 10 fois supérieure. La puissance éolienne installée, bien que considérable - plus de la moitié de la puissance appelée - est encore quasiment absente pendant les 15 jours de grands froids à partir de mi-novembre.
Fig. 5 - Puissance totale (en MW) appelée en France en novembre 2030 (même appel qu’en 2010) et puissance fournie par l’éolien (en noir : puissance installée 53.000 MW) et l’hydraulique (en bleu)
Sur la période de 15 jours entre le 15 et le 30 novembre 2030 (336ème à 720ème heure sur les figures 4 et 5), la consommation d’énergie serait de 27.000 GWh par jour et l’éolien ne pourrait fournir que 3.000 GWh, soit 11% du besoin alors que la puissance nominale des éoliennes serait du même niveau que la puissance nucléaire. L’hydraulique pour sa part fournirait 2.700 GWh, dont la moitié seulement environ avec les barrages et les stations de pompage qui sont les seuls stockages de masse d’électricité. On voit bien que, même avec une hypothèse optimiste d’augmentation de 20% de l’énergie fournie par l’hydraulique en 2030, il faudra trouver d’autres moyens pour compenser une pénurie de courant éolien dans un tel épisode climatique, d’autant plus que, comme on le voit clairement, l’hydraulique est essentielle pour contribuer au suivi journalier.
Comme l’apport du solaire sera très limité en hiver l’appel à de nouveaux moyens devra être important si, au nom de la politique de diminution des émissions de CO2 préconisée par l’Europe, on s’interdit un repli sur le charbon et le gaz.
1.2. La situation Française en janvier/février 2012 et l’apport comparé du nucléaire, de l’éolien et du solaire
Hubert Flocard et Jean-Pierre Le Gorgeu ont examiné la vague de froid de février 2012 en France :
(http://www.sauvonsleclimat.org/etudeshtml/la-servante-et-les-danseuses-lelectricite-pendant-la-vague-de-froid-de-fevrier-2012/35-fparticles/1112-la-servante-et-les-danseuses-lelectricite-pendant-la-vague-de-froid-de-fevrier-2012.html). Ce document montre la même difficulté à gérer l’éolien pendant une vague de froid atypique, puisque l’anticyclone qui l’a engendrée avait pour la France une caractéristique intéressante : celle d’être placé à ses frontières. La période a été caractérisée par moment par des vents violents qui ont encore augmenté l’impression de froid, et accentué les besoins d’énergie. La publication, dont est extraite la figure 6, montre la variation par quart d’heure des puissances comparées réelles fournies par trois moyens de production différents (nucléaire, éolien et solaire), normés à 1 GW:
Fig. 6 : Période du 23/01 au 19/02 2012. Toutes les courbes indiquent, pour un moyen de production donné, la puissance qu’il a livrée au réseau (en MW) par GW de puissance installée (1GW=1000MW) en France ou en Allemagne. La courbe bleue correspond au Nucléaire France, la courbe verte à l’éolien France et la courbe rouge au solaire PV Allemagne. Données françaises : eCO2mix/RTE. Données allemandes : transparency.eex.
A une période de besoin extrême (le record d’appel de puissance en France), pour un même GW de puissance installée:
- Les centrales nucléaires fournissent une puissance de 0,95 GW, quelques centrales sur 58 étant en arrêt pour rechargement ou visite décennale, et les autres fonctionnant à 100% de leur capacité.
- Les 3000 à 3500 éoliennes fournissent en moyenne 0,20 GW par GW installé, sauf lors de trois épisodes courts de vent forts (1 à 2 jours) ou elles atteignent des pics de 0,55 à 0,61 GW. Dans une hypothèse 2030 avec 50 GW de puissance éolienne le réseau aurait eu à supporter le 2 février, en moins de 24 heures, une augmentation de puissance d’environ 20 GW, puis 2 jours après une baisse de même amplitude, tout en mobilisant la totalité des autres moyens de production pendant cette période glaciale de 2 semaines.
- Faute de renseignements sur la production solaire en France la figure ci-dessus présente aussi la productivité du solaire en Allemagne aux mêmes dates : elle n’est que de 4% en moyenne, soit 0,04 GW par GW installé, malgré parfois un temps plutôt ensoleillé. Le rythme est régulier mais le solaire injecte dans le réseau une puissance dont la cinétique d’évolution est elle-même très rapide, s’ajoutant à l’occasion à celle de l’éolien. Le rendement serait un peu meilleur en France (5% au lieu de 4% à la même période de l’année), ce qui ne changerait rien.
1.3. Le foisonnement de la production éolienne en Europe de l’Ouest
Il est maintenant nécessaire d’observer la production éolienne au niveau de l’Europe pour déterminer sa capacité à mieux répondre aux besoins, grâce à la variété et la complémentarité des régimes de vent impliqués dans ce vaste espace géographique et au foisonnement plus important des productions qui en résulte.
Pour évaluer cet impact, les productions éoliennes horaires de l’hiver 2010/2011 de 7 pays, qui représentent un bon échantillonnage de l’Europe de l’ouest[2], ont été enregistrées heure par heure[3].
Fig. 7 - Empilement des productions éolienne en Europe de l’Ouest (7 pays), heure par heure et en MW, de septembre 2010 à mars 2011
Le résultat, présenté en figure 7, révèle une variabilité encore forte. Toutefois sur cette figure on constate que les deux productions de l’Allemagne et de l’Espagne, qui représentent à elles seules 75% de la puissance installée fin 2010, sont prépondérantes. Ce ne devrait plus être le cas en 2030 car ces deux pays atteindront rapidement le niveau d’implantation éolienne maximum supportable alors que, dans le même temps, les autres pays devraient avoir augmenté considérablement leurs contributions dans les scénarios avec énergies renouvelables renforcées.
La contribution éolienne 2030 de chaque pays a ainsi été établie en affectant à la production réelle 2010/2011, à climat équivalent, un coefficient multiplicateur : il correspond au ratio des puissances prévues en 2030[4], relatif à un scénario éolien renforcé, à celles opérationnelles fin 2010. Le foisonnement obtenu, figure 8, est ainsi optimisé et fonction du poids respectif de chaque zone climatique en 2030.
Fig. 8 - Empilement des productions éoliennes en MW, sur 7 mois d’hiver, qu’auraient les 7 pays pour une puissance éolienne totale triple de l’actuelle (187500 MW au lieu de 65000).La contribution de chaque pays est représentée par une couleur différente. L’enveloppe des courbes correspond à la production totale.
Les deux figures 7 et 8 montrent bien un lissage des productions résultant d’une meilleure répartition des puissances éoliennes dans ces pays. Cependant il reste limité. La fluctuation de la puissance et son imprévisibilité à moyen et long terme restent marquées. Dans le scénario 2030 les puissances minimales et maximales correspondent respectivement à 4% et 60% de la puissance totale installée Pn. La puissance moyenne s’élève à 21% de Pn. On remarque des minima et des maxima légèrement moins marqués que ceux montrés sur les courbes françaises, ce qui démontre l’effet de foisonnement. On notera aussi que l’efficacité moyenne 2030 est sans doute sous-évaluée d’environ 5% car l’éolien offshore, encore insignifiant en 2010, sera plus important en 2030 et contribuera avec des rendements qui devraient être de 25% supérieurs à ceux de l’éolien terrestre.
Il est cependant préoccupant de constater :
- des épisodes globaux de pénurie de puissance éolienne - moins de 15% de Pn - apparaissant par grands froids durant une à deux semaines (sur la figure 8 les anticyclones sont indiqués par des segments horizontaux de couleur rouge). Un exemple de cette situation est montré ci-dessous figure 9 par un « agrandissement » correspondant, pour 2030, à une période similaire à celle de novembre 2010. On constate que l’ensemble de l’Europe de l’Ouest peut être affecté par un anticyclone pendant des durées de plusieurs semaines, conduisant à des productions faibles, de l’ordre de 15% de la puissance totale pendant une dizaine de jours, voire même inférieure à 10% pendant deux jours. Bien que particulièrement long, ce type d’épisode se reproduit tous les deux ou trois ans alors que des périodes sans vent de quelques jours s’observent plus fréquemment (par exemple en décembre 2010 et par deux fois en janvier 2011 (voir fig. 6)
Fig. 9 - Empilement des productions éoliennes cumulées en MW sur un mois (novembre/décembre 2010, qu’auraient les 7 pays pour une puissance éolienne totale triple de l’actuelle (187500 MW au lieu de 65000).La contribution de chaque pays est représentée par une couleur différente par empilement.
- des épisodes d’évolution brutale des puissances figure 10 (4% de la puissance totale/heure, soit 8.000 MW/h).
Fig. 10 - Empilement des productions éoliennes cumulées en MW (situation similaire à celle du 11 au 13 novembre 2010), qu’auraient les 7 pays pour une puissance éolienne totale triple de l’actuelle (187500 MW au lieu de 65000).La courbe supérieure correspond donc à la puissance totale fournie au pas horaire.
Une variation de puissance éolienne de 75.000 MW est ainsi possible en une journée, pour une puissance totale consommée de l’ordre de 200.000 MW, tous moyens de production inclus, sans compensation efficace possible grâce aux réseaux transfrontaliers. Les seuls recours seraient alors des effacements massifs et un recours au gaz et à d’éventuels moyens de stockages.
- une puissance « garantie », puissance sur laquelle le gestionnaire de réseau peut compter, limitée environ à 5% de Pn. Une puissance de secours très importante est donc requise, sans espoir qu’elle puisse provenir du solaire, particulièrement en hiver.
Un examen des 6 mois d’été montre également des pénuries de production éolienne en situations anticycloniques, avec températures très élevées, le solaire pouvant cependant apporter une compensation partielle.
1.4. Les limites du foisonnement
Le foisonnement est un phénomène réel, qui améliore la régularité de fourniture de l’électricité éolienne par rapport à un pays seul ou une zone géographique ne bénéficiant que d’un seul régime de vent. Mais ce foisonnement reste limité pour la France, comme on peut le constater en examinant la variabilité du système français qui bénéficie déjà de trois régimes de vent, aussi bien que pour l’Europe de l’Ouest : les puissances maximales et minimales européennes (63 % et 4,1 % de Pn) sont à peine plus favorables que celles que nous constatons en France (71 % et 3,3 % de Pn).
On démontre de plus, ce qui n’était qu’effleuré dans les publications antérieures, que les périodes d’appel maximal de puissance, en hiver comme en été, sont généralement anticycloniques et que l’éolien devient dans ces situations très inefficace (4 fois sur 5 environ) sur des durées qui peuvent être longues, de une à deux semaines.
Il se peut que la situation soit améliorée par le développement de l’éolien marin (malgré un coût de production au moins double) dont il est souvent dit que la production serait plus régulière[5]. Toutefois, cela reste à démontrer à partir de données mesurées plutôt qu’anticipées. De toute façon, peu de gain est à attendre en période anticyclonique.
Cette étude du foisonnement éolien mériterait d’être complétée par celle du solaire électrogène mais les données font défaut, les productions horaires correspondantes n’étant pas publiques.
L’importance des perturbations apportées par l’éolien aux réseaux peut être appréciée quand on sait que des pays voisins de l’Allemagne envisagent de se protéger des variations de sa production éolienne en introduisant un déphasage de tension entre leurs réseaux, pour bloquer les transferts d’électricité en excédent.
2. Compenser le foisonnement par le stockage.
Une contrainte très lourde pèse sur la production d’électricité : il faut à chaque instant que la production équilibre la consommation, à 2% près et sur l’ensemble de l’Europe interconnectée. Une solution pourrait donc être un stockage d’électricité permettant de conserver l’énergie quand il y a beaucoup de vent et de la restituer lors des périodes calmes, lorsque la consommation électrique le requiert.
Il est intéressant de faire un point sur l’importance de ce stockage aujourd’hui.
2.1. Le stockage d’électricité en 2010
En 2010 la puissance électrique installée dans le monde était d’environ 4.400.000 MW. Les stockages opérationnels pour la production centralisée d’électricité étaient approximativement les suivants
- Stations de transfert par pompage (STEP) : 140.000 MW
- Air comprimé : 430 MW (Allemagne et US)
- Batteries NaS : 400 MW (Japon)
- Batteries plomb : 45 MW
- Batteries Li : 45 MW
- Batteries NiCd : 40 MW
- Volants d’inertie : 40 MW (US)
- Batteries Redox : 3 MW
On constate que la puissance des installations de stockage ne représentait alors que 3% de la puissance mondiale totale, en quasi-totalité grâce aux STEP, les autres technologies ne contribuant que pour 0,023%. Ces autres technologies de stockage sont en effet soit balbutiantes (air comprimé), soit peu efficaces et coûteuses (figure 11).
Fig. 11– Efficacités comparées des divers moyens opérationnels de stockage de l’électricité : puissance et temps de décharge
Or ces dernières années l’accroissement de puissance annuelle des parcs de production intermittente éolienne et solaire est considérable : il était de 45.000 MW en 2010 dans le monde pour une puissance installée totale de 200.000 MW (environ la moitié en Europe).
Les situations européenne et française sont particulières car le développement des STEP est déjà important[6]. Du coup les scénarios à long terme ne laissent pas espérer qu’on puisse en construire beaucoup d’autres, puisque les sites de montagne, les plus intéressants et les plus efficaces, sont déjà largement équipés. Les STEP de vallée ou de bord de mer (atolls par exemple), peu développées, font appel à des tailles d’installations considérables (le volume d’eau à stocker est inversement proportionnel à la différence d’altitude entre les deux niveaux haut et bas de l’eau).
C’est la raison pour laquelle les espoirs semblent actuellement se tourner vers une option de stockage futuriste : la production d’hydrogène par électrolyse lors des périodes de surproduction d’énergie éolienne ou solaire. On notera qu’en ce qui concerne le solaire à concentration (non développé en France) la voie du stockage thermique est une alternative déjà utilisée.
L’hydrogène n’étant qu’un vecteur énergétique, divers usages énergétiques peuvent en être envisagés. Ainsi, selon les divers scénarios, l’hydrogène produit pourrait ultérieurement être soit injecté dans le réseau de gaz naturel, soit contribuer à la production d’électricité par une turbine à gaz, soit alimenter une pile à combustible, soit servir à produire du méthane avec du CO2 provenant d’unités de séquestration du CO2 produit par les centrales à combustible fossiles.
Sans entrer dans une analyse de ces diverses possibilités d’utilisation de l’hydrogène « renouvelable », possibilités dont les rendements sont plus ou moins pénalisants – souvent de façon mal connue -- et dont la faisabilité à des conditions économiques acceptables est encore loin d’être assurée, on peut déjà examiner la première étape, à savoir, les conditions d’un couplage d’un parc éolien avec des installations industrielles de production d’hydrogène par électrolyse.
2. 2. Quel impact d’une production d’hydrogène en 2030
Aucun scénario réaliste d’un développement massif de cette technologie n’ayant été décrit, nous proposons ici une première analyse.
◊ Quand mobiliser les électrolyseurs
Dans cette étude nous avons choisi d’examiner la situation par une analyse simplifiée, notre ambition étant seulement de dégager des ordres de grandeur.[7].
- Le processus éolien àélectrolyseurs àstock H2 àproduction d’électricité étant d’une efficacité médiocre (de 30% à 35% environ[8]), l’électricité éolienne doit être utilisée directement par injection dans le réseau autant que celui ci est en mesure de l’accepter,
- Le surdimensionnement de la puissance éolienne, et donc celui d’un besoin massif de centrales à gaz en secours, est à éviter,
- Les électrolyseurs sont capables de toute la souplesse d’usage (cinétique de mise en service) requise par la production éolienne - ce qui est à démontrer - de façon à toujours fonctionner à leur régime optimal.
Dans ces conditions, l’analyse suppose que les électrolyseurs ne sont mis en route qu’au dessus d’un seuil de production de l’éolien, et utilisent alors la puissance en excès. Sur la figure 12 on considère donc que toute la production au dessus du trait rouge, qui représente un seuil possible, est consacrée aux électrolyseurs le reste, sous le trait rouge, alimente directement le réseau qui est ainsi soumis à des variations de puissance atténuées, exigeant moins puissance de secours gaz (ou autre).
Fig. 12– Europe 2030 avec 187.500 MW éoliens : sous le trait rouge (24% Pn ou 45.000 MW) l’électricité alimente le réseau et le reste, au dessus du trait rouge, alimente les électrolyseurs
◊ Puissance affectée aux électrolyseurs
On peut alors par soustraction de la puissance alimentant directement le réseau, obtenir la production horaire d’électricité qui, pour un seuil donné, alimente les électrolyseurs (figures 13 sur 7 mois et détail figure 14 sur 1 mois):
Fig. 13 – Europe 2030 avec 187.500 MW éoliens (Sept à mars) : toute l’énergie produite au dessus du seuil (24% de Pn ou 45.000 MW) est délivrée aux électrolyseurs.
Pour ce choix d’un seuil à 45 GW, soit à peu près ¼ de la puissance éolienne installée, la production d’électricité délivrée en 7 mois aux électrolyseurs est de 10,8% de la production éolienne totale, soit 21,6 TWh. Le parc d’électrolyseurs fonctionne alors pendant 29,6 % du temps soit 1500 h sur 5090. La figure ci-dessous, qui présente le détail de mi-octobre à mi- novembre, suggère les remarques suivantes :
- le temps de fonctionnement est faible et l’énergie fournie aux électrolyseurs est très variable,
- les cinétiques d’évolution sont très rapides, par exemple + 67000 MW en 18 heures le 11 novembre,
- les périodes de quasi arrêt sont très longues, de l’ordre d’une quinzaine de jours.
Fig. 14 – Europe 2030 avec 187.500 MW éoliens (15 oct. 15 nov.): toute l’énergie produite au dessus du seuil (24% de Pn ou 45.000 MW) est délivrée aux électrolyseurs.
En faisant varier la valeur du seuil, on peut faire une étude de sensibilité en fonction de la part du talon de production éolienne qui est réservée à une alimentation directe du réseau (figure 15). Ainsi le nombre d’heures de fonctionnement annuel des électrolyseurs variera de 6000 h à 400 h par an selon qu’on choisira de les mettre en exploitation au dessus d’un seuil variant de 30.000 à 70.000 MW pour une puissance installée de 187.500 MW (donc entre ~1/6 et un peu moins de 1/2 de la puissance éolienne installée).
Fig. 15– Europe 2030 avec 187.500 MW éoliens (15 oct. 15 nov.): heures annuelles de fonctionnement des électrolyseurs en fonction du seuil de puissance au dessus duquel ils sont mis en service.
On peut de la même manière évaluer l’énergie fournie aux électrolyseurs pour produire de l’hydrogène en GWh ou en pourcentage de l’énergie totale fournie par l’éolien, sachant que la production totale des éoliennes serait de 200 TWh ou 200.000 GWh (figure 16) :
Fig. 16 – Europe 2030 avec 187.500 MW éoliens (15 oct. 15 nov.): énergie délivrée aux électrolyseurs (en GWh ou % de l’énergie totale fournie par les éoliennes) en fonction du seuil de puissance au dessus duquel ils sont mis en service.
On constate que pour un seuil médian de 45 GW sur 187,5 GW ou 24% de la puissance installée, seuil qui optimise l’utilisation en ligne du courant éolien, les électrolyseurs recevraient 21,6 TWH sur les 200 TWh produits par les éoliennes, soit 11% de l’énergie. Avec un rendement de restitution de 35%, sans préjuger de la solution retenue pour transformer l’hydrogène en électricité et de la cinétique de cette production, on ne récupèrerait que 7,6 TWh électrique ou 3,8% de l’énergie produite par les éoliennes en 7 mois, ce qui semble faible.
Le choix d’un seuil plus bas augmenterait certes la productibilité des électrolyseurs mais serait aux dépens de la production d’énergie totale compte tenu du faible rendement complet de ce cycle réversible. Inversement le recours à des centrales à gaz destinées à compenser l’intermittence serait diminué. Dans un tel dispositif de stockage de l’hydrogène, une analyse plus fine permettrait de dégager le meilleur compromis entre perte d’électricité éolienne et besoin de centrale à gaz de sécurité.
◊ Fonctionnement des électrolyseurs
Comment optimiser par ailleurs l’investissement en électrolyseurs par une gestion appropriée de leur fonctionnement. Considérons le cas d’un seuil de démarrage de l’électrolyse placé à 45 GW. En principe, il conviendrait d’installer un parc d’électrolyseurs capable d’accepter une puissance instantanée de 68 GW (puissance max 113 GW – 45 GW). Ceci semble excessif étant donné que les pics de très forte puissance sont rares. En examinant la figure 13, on voit qu’en arrêtant de la production éolienne en excès de 70 GW, on ne perdrait que 3,4 TWh soit 1,7 % de la production. L’énergie transférée aux électrolyseurs serait alors réduite de 21,6 à 18,2 TWh. Par contre on réduirait des deux tiers, à 25 GW, la puissance maximale injectable dans le parc d’électrolyseurs, évitant ainsi un surinvestissement notable.
Il faudrait aussi veiller à ce que chaque électrolyseur fonctionne à pleine capacité, pour obtenir un rendement optimal. Dans ces conditions, les hypothèses retenues devant bien sûr être confirmées, sur un parc de 100 électrolyseurs le taux de fonctionnement annuel par tranche de 20 électrolyseurs évoluerait de 29 à 6 % (figure 17). A nouveau des calculs d’optimisation sont envisageables. On peut néanmoins s’interroger sur la rentabilité d’électrolyseurs fonctionnant moins de 10 à 15% du temps, sauf à pouvoir utiliser pour le stockage d’autres énergies intermittentes (solaire par exemple) été comme hiver. En effet dans le document cité en référence[9] le coût d’amortissement était estimé à 7 $/GJ pour un électrolyseur industriel fonctionnant de manière continue. Avec un taux d’utilisation de 15% le seul coût d’amortissement serait alors voisin de 135 €/MWh, à ajouter au coût de production de l’éolien, à celui d’amortissement du stockage d’hydrogène et au coût d’exploitation de l’unité de stockage.
Fig. 17 – Taux de fonctionnement annuel en % de 100 électrolyseurs, par tranches de 20, pour un parc d’électrolyseurs limité à 25 GW de puissance de fonctionnement crête (la puissance éolienne étant limitée à 70 GW crête sur ordre du gestionnaire de réseau)
◊ Centrales de secours
En assimilant la production éolienne à une production de base, ce qui serait normal puisque c’est une production subie, il faudrait la compléter par d’autres moyens pour assurer une production constante de 45 GW au réseau, soit 229 TWh en 7 mois. Pour ce faire il faudrait injecter, en plus des 199 TWh fournis par les éoliennes directement au réseau électrique, 30 TWh produits par du gaz, ou les 7,6 TWh stockés dans le cycle hydrogène par grands vents avec 22,4 TWh produits par du gaz. En effet seule cette dernière production est susceptible de répondre à toutes les cinétiques d’évolution du vent. Les centrales à gaz de secours, dont la puissance devrait être d’environ 35 GW, écart entre le niveau bas de production des éoliennes et 45 GW, ne fonctionneraient donc qu’à 13 % de leur capacité si l’énergie hydrogène est récupérée, ou à 17 % si l’hydrogène est orienté vers une autre filière (injection dans le réseau gaz par exemple avec un meilleur rendement ou méthanation).
Le suivi de charge serait assuré par ailleurs, en fonction des coûts marginaux de production, par le nucléaire en base puis le nucléaire équipé pour le suivi de charge et le charbon en semi-base, l’hydraulique pour les pointes hebdomadaires et journalières, et le gaz puis le pétrole pour les pointes extrêmes. Ce schéma devrait lui-même être ajusté pour tenir compte des souplesses de pilotage de ces divers moyens de production.
2.3. Conclusion sur le stockage hydrogène
Cet examen sommaire montre que le secours qu’on peut attendre de la voie hydrogène de stockage est problématique : temps de fonctionnement limité, variabilité considérable des pics de production éolienne, investissement important pour un taux d’usage faible, incertitude sur les performances des processus de transformation de l’hydrogène stocké en électricité et importante perte d’une énergie électrique éolienne initiale déjà chère par elle même. De même, notre analyse montre que l’investissement en générateurs d’électricité de secours utilisant le gaz sera lui-même très sous employé, dans des conditions souvent peu optimales pour son rendement, et donc coûteux.
Elle montre avant tout qu’il est essentiel d’engager une modélisation complète d’un système de production dans l’hypothèse de puissances installées renouvelables intermittentes très importantes, incluant toutes ces énergies (solaire en particulier) et les diverses technologies de stockage (hydrogène et autres), avec des critères d’optimisation à préciser, par exemple minimisation des investissements, de la production de CO2, de la combustion des combustibles fossiles, tout ceci à un coût acceptable par les consommateurs.
On peut de plus noter que cette difficulté d’adaptation d’un moyen de « stocker » de l’électricité à la production d’énergies aussi variables que l’éolien et le solaire sera la même pour tout type de stockage (hydraulique, pneumatique ou autres). Surinvestissement, souplesse de fonctionnement à des puissances injectées très variables, faible taux d’usage, transport de l’électricité d’un bout à l’autre de l’Europe : ces caractéristiques pèseront sur la fiabilité et la rentabilité de ces équipements.
On peut également noter que la voie hydrogène aurait un meilleur rendement si ce combustible rejoignait une filière chaleur, par exemple par injection de l’hydrogène dans un réseau de gaz.
3. Conclusion générale
L’examen de deux paramètres, le foisonnement des productions éoliennes et la performance d’un stockage d’électricité par la voie hydrogène, montre que le sujet est complexe, même en se limitant à des hypothèses préliminaires très simplifiées. En l’état, les analyses sur ce sujet que l’on peut trouver dans les scénarios énergétiques accordant une place importante à l’éolien n’ont certainement pas le niveau de sophistication adapté à l’industrie de l’électricité, dont un fonctionnement sans à coups est essentiel pour la viabilité de notre économie et le confort des citoyens.
A notre connaissance aucune étude de grande ampleur n’a été encore été engagée alors que le monde politique semble s’orienter, un peu à l’aveugle, vers des choix de scénarios énergétiques dont certains peuvent se révéler inefficaces et couteux, voire dangereux pour les économies de la France autant que de l’Europe. Une telle étude, multiparamétrique, sera longue. En effet, elle devra aussi intégrer toutes les énergies intermittentes, la réussite ou non des efforts en direction de l’efficacité énergétique, le devenir de technologies émergentes (séquestration du CO2 par exemple), la capacité de suivi de charge de l’ensemble des composantes du mix énergétique. Il nous semble urgent de l’engager.
Remerciements
Les auteurs tiennent à remercier J.P. Le Gorgeu, G. Gutner, E. Huffer et B. Tamain pour leur contribution à la collecte des données européennes discutées dans ce document ainsi que pour leurs suggestions et commentaires sur ces données.
[1]Cette notion de productivité correspond au ratio entre la production réelle et la production qu’auraient eu les éoliennes en fonctionnant à pleine puissance la totalité du temps. On l’exprime aussi en HEPP ou Heures Equivalent Pleine Puissance sur l’année : 22,8% correspond à 2000 HEPP
[2]Puissance éolienne en MW fin 2010 : Allemagne+Autriche 28200, Espagne 20700, France 5700, Danemark 3800, Irlande 1430, UK 5200
[3]Sources:
§ http://www.rte-france.com/frpour la France (site ecO2mix)
§ http://www.eirgrid.compourl'Irlande
§ http://www.ree.espour l'Espagne
§ http://www.transparency.eex.com/depour Allemagne + Autriche
§ http://www.energinet.dkpour le Danemark
§ http://www.exelon.co.uk et http://pfbach.dk/ pour l’Angleterre
[4]Puissance éolienne annoncée dans des scénarios énergétiques en MW fin 2030 : Allemagne+Autriche 60000, Espagne 30000, France 53000, Danemark 4500, Irlande 10000, UK 30000
[5] Cette affirmation n’est cependant pas confirmée par une première analyse de 17 mois de production du parc offshore écossais Robin Rigg effectuée dans l’analyse SLC que l’on trouvera à l’adresse suivante :http://www.sauvonsleclimat.org/fr/base-documentaire/vent-de-mer-vent-de-terre. Le lecteur pourra par exemple se faire une opinion de cette régularité à partir des figures 6 ou 9.
[6]En France en 2011 la puissance hydraulique installée est de 25,7 GW et la production 67,5 TWh, soit un rendement moyen de 30%.Les barrages, 9 GW assurent un suivi saisonnier, leur potentiel étant de 16,5 TWh Les 4,2 GW d’éclusées permettent un stockage « court », la journée, avec un potentiel de production de 10,6 TWh. Les STEP, 5 GW mobilisables en quelques minutes, répondent aux besoins, hebdomadaires, environ 20 TWh.
[7]Des renseignements précieux peuvent être extraits d’une publication datant de 2010 donnant les résultats d’une installation pilote norvégienne mobilisant, autour d’un parc éolien de 600 kW, un électrolyseur, un stockage d’hydrogène et une PAC : « The wind/hydrogen demonstration system at Utsira in Norway: Evaluation of system performance using operational data and updated hydrogen energy system modeling tools”: Øystein Ulleberg a,*, Torgeir Nakken b, Arnaud Ete´
[8] Par exemple, les rendements unitaires, mal connus à une échelle industrielle, serait de 70 à 80 % pour l’électrolyse avec stockage sous pression de l’hydrogène, et de 40 à 50% pour la pile à combustible.
[9]AFH2- « L’hydrogène :pour relever le défi énergétique du XXIèmesiècle » - P. Malbrunet & Tapan Bose