Une aberration climatique : le MTES propose la mise au rebut d’une réserve nationale d’uranium appauvri

Jean-Pierre PERVES

Une aberration climatique : le MTES propose la mise au rebut d’une réserve nationale d’énergie considérable, l’uranium appauvri

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Alors que le gouvernement se révèle incapable de proposer une vraie politique climatique, souple, adaptable et à très long terme, ainsi qu’une vision du rôle du nucléaire, le Ministère de la Transition Énergétique et Solidaire (MTES) propose, en catimini, dans le cadre d’une consultation sur le Plan national de gestion des matières et déchets nucléaires, de transformer l’essentiel de notre stock national d’uranium appauvri (Uappauvri) en déchets.

Ce faisant il met en consultation un sujet technique très complexe, que la quasi-totalité des français ne connaît pas, celui de l’utilisation par les générations futures d’un potentiel énergétique considérable, nous appartenant et déjà sur notre sol. L’Uappauvri ouvre la voie, à partir de technologies de réacteurs nucléaires déjà largement étudiées et démontrées, à la production de milliers d’années d’électricité décarbonée, voire de chaleur. Cette production :

  • serait sans impact sur le climat ni sur la pollution urbaine,
  • et, ce qui est essentiel, elle est pilotable et servirait, comme aujourd’hui, à assurer l’équilibre et la stabilité du réseau électrique (contrairement aux énergies intermittentes).

Ce faisant, la Ministre rejoint le souhait d’organisations clairement antinucléaires, exprimé lors du débat précédent. Comment une ministre de l’environnement peut-elle faire fi de la préservation de ressources considérables et du bienfait du recyclage, avec l’appui d’associations se référant à l’écologie mais agissant, de fait, contre une politique climatique efficace ? 

L’Autorité de Sûreté Nucléaire (ASN), qui n’est pas compétente sur la politique énergétique nationale, a repris cette demande. Mais elle rappelle très justement que cet Uappauvri est une réserve d’énergie sur des millénaires et estime, si sa requalification en déchet était retenue, qu’elle devra rester réversible.

En étant pragmatique :

  • Il n’y a aucune urgence à réviser la doctrine actuelle d’entreposage sur la base d’une consultation volontairement précipitée et sans ambition climatique. Le succès du programme de transition énergétique est loin d’être assuré, particulièrement vis à vis des objectifs de lutte contre le changement climatique, et la crise économique ne justifie pas des dépenses non essentielles ;
  • L’ASN pointe une vraie question qui est celle du contrôle à très long terme, du point de vue de la sûreté nucléaire, de matières stables, d’un volume limité, mais qui n’en sont pas moins radioactives, même si c’est faiblement.
  • La seule solution logique serait la constitution d’un stockage stratégique d’une ressource énergétique (on parle de millénaires de ressources), l’Uappauvri, garantissant son accès aux générations futures, aux conditions requises de sûreté. Mais il n’y a pas urgence, les entreposages étant sûrs, et nous ne saurons que dans 30/50 ans si la dérive du climat est maîtrisée.
  • Il est évident que le stocker dans le stockage géologique CIGEO, programmé par la France pour ses déchets ultimes serait totalement inadapté. Il est en effet conçu pour rendre, une fois fermé, extrêmement difficile (voire impossible) toute réversibilité, réversibilité que préconise l’ASN.
  • En conséquence l’ASN devrait, quand utile et sur propositions et en concertation avec les industriels concernés, proposer les critères de conception d’un tel stockage stratégique.

Le ministère veut-il ignorer que la France reste un des leaders mondiaux du cycle du combustible nucléaire ainsi que des réacteurs de 4ème génération, capables de consommer cet Uappauvri ? C’est l’industrie nucléaire, qui emploie 220 000 personnes, qui est à nouveau attaquée par la ministre.

 

 

Lien vers l’avis de Jean-Pierre PERVES (SLC) : 201109_Avis_SLC_sur_requalification_U_appauvri_en_dechet

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